Source : www.cyberpresse.ca/le-quotidien/
Notre culture, un acquis précieux à célébrer
Alors qu'on célèbre les 50 ans du début de la Révolution tranquille et cinq décennies d'action culturelle du gouvernement du Québec, on ne peut que s'incliner devant l'ampleur des réalisations qui nous ont sortis de la noirceur et propulsés dans la lumière de la modernité et de la liberté de création.
Le Québec s'est défini et affirmé comme nation en favorisant la création
d'oeuvres originales ancrées dans sa réalité et en valorisant la
maîtrise des moyens d'expression artistique permettant une appropriation
authentique du patrimoine culturel de l'humanité.
En alignant ses politiques, initiatives et investissements sur la
poursuite de l'excellence artistique, la création d'institutions
durables et la construction d'une industrie culturelle performante,
l'État québécois est parvenu à développer une offre artistique et
culturelle foisonnante, constamment renouvelée et appréciée ici et à
l'échelle de la planète, d'abord dans la francophonie puis bien au-delà.
C'est un acquis précieux à célébrer.
Cependant, force est de constater que pour la majorité de la population,
la participation, la fréquentation et la pratique assidues des arts
n'atteignent pas les niveaux escomptés. Cela reste un défi à relever.
Ici, comme dans les autres démocraties, on constate qu'en culture,
l'offre ne détermine pas la demande. L'accroissement de cette demande
résulte plutôt d'un travail systématique d'éducation qui doit être fait
sans quoi l'offre artistique formidable soutenue par l'État, le mécénat
et la commandite restera confinée à une fraction de la population qui a
eu le privilège d'être initiée et qui en a les moyens financiers.
Le défi de la démocratisation culturelle est d'une importance cruciale
pour le Québec dont le dynamisme artistique et culturel est devenu une
condition sine qua non d'affirmation, de différenciation, même de survie
à l'ère de la mondialisation des échanges.
En dépit des immenses possibilités offertes par les technologies de
communication, et malgré les offensives tous azimuts pour élargir les
publics en modulant l'offre et en misant sur une gratuité financée par
des commandites commerciales omniprésentes, on constate une stagnation
de la fréquentation des arts et des activités culturelles plus
exigeantes sur le plan intellectuel. Cet état de fait est encore plus
marqué au sein de la jeunesse et dans les communautés aux prises avec
des enjeux d'intégration et d'émancipation économique.
La volonté de démocratisation culturelle doit être constamment ravivée
sinon on risque de perpétuer des fractures sociales qui désavantageront
toujours celles et ceux qui ne peuvent pas avoir accès à la création
artistique et à la vie culturelle que nous nous donnons comme société
moderne.
Le Québec ne peut pas se permettre de fléchir dans son soutien aux artistes et au secteur culturel.
Cela dit, nous pouvons et nous devons innover davantage en matière en
défendant l'idée d'une citoyenneté active enrichie par la fréquentation
des arts et du patrimoine et par des pratiques culturelles soutenues.
Il faut ramener les arts et la culture au coeur de la vie quotidienne.
On n'y échappe pas, l'initiation aux arts et aux pratiques culturelles
doit commencer dès le jeune âge, dans la famille, à la garderie puis à
l'école. Il faut bonifier l'accès et la fréquentation des arts à tous
les niveaux des ordres scolaires. Nous pourrions aussi ajouter un
enseignement sur l'initiation à la culture au cursus de la formation des
maîtres. Ne pas le faire ne fera qu'accentuer la coupure entre culture
et citoyenneté.
Le gouvernement du Québec a entrepris, pour le 50e anniversaire du
ministère de la Culture, de mettre en place un nouveau plan d'action qui
sera l'occasion de revoir et d'actualiser la politique culturelle dont
le Québec s'était dotée en 1992. Profitons de cette occasion pour mettre
de l'avant ces idées.
Lorsque nous avons lancé les Journées de la culture, il y a 15 ans, nous
souhaitions bien naïvement que ce grand projet ait des répercussions
rapides sur l'achat de spectacles ou de droits d'entrée dans les musées.
C'est plutôt l'impérieuse nécessité de reconnecter le milieu culturel
avec la population qui s'est imposée et qui nous mobilise chaque année.
Les Journées de la culture sont devenues un amplificateur de la cause
culturelle comme projet de société. Elles sont devenues incontournables
pour le Québec.
Louise Sicuro
Présidente-directrice générale Culture pour tous
Fondatrice des Journées de la culture